1C’est bien dingo de se dire que cela fait déjà plus d’un mois que je vous ai écris. J’ai l’impression de vivre dans une centrifugeuse émotionnelle, je vois les gens autour de moi s’écrouler, le plus souvent d’un coup, comme si un petit fantôme passait avec un marteau et éclatait leurs rotules. Les rotules de leurs corps, mais parfois de leurs coeurs et souvent de leurs âmes.
Qu’est-ce qui se passe ?
La rage de vivre à en hurler est toujours là, je pourrais dire pourtant mais je vais ajouter plus que jamais. J’entends nos coeurs alcooliques rechercher l’ivresse de la sensation et le deséspoir exsuder de nos pores. Le monde a l’épiderme en chien. Il faudrait demander aux ancien.ne.s si ce tsunami d’émotions semi-clandestin et semi-global c’est une première pour elleux aussi. J’aimerais bien savoir si toutes ces tensions et ces points de rupture sont les indicateurs d’un moment ellestorique2 ou une banalité qui m’émerveille parce que c’est la première fois que j’en prends conscience.
Alors quoi ?
Alors un pas devant l’autre malgré le cerveau qui déborde d’émotions.
Dans ma capsule actuelle3 je réfléchis beaucoup et je parle beaucoup du concept de changement et du paradoxe dans lequel nous nous trouvons actuellement, à vouloir un autre monde alors qu’on a été éduqué à associer stabilité avec bonheur (logement fixe, CDI, famille, passeport, diplômes) et donc qu’on essaye consciemment de détruire un monde alors même que cette destruction nous met en position de vulnérabilité extrême. Je crois qu’en ce moment on essaye de retourner à un état plus naturel, celui qui se veut mouvant, dans le flow et connecté aux autres êtres vivants. Mais la grande découverte c’est combient c’est dur, voire même violent, d’apprendre à associer l’idée de bonheur à l’état d’impermanence ; d’accepter que rien n’est acquis.
Faut-il faire le deuil de tout ce que l’on ne cesse de perdre ou arrêter de vouloir avoir ?
C’est le bordel, oui, tout à fait.
Donc, la Protopie.
Ce mot que j’ai calé dans mon coeur depuis deux ans, vous l’avez adopté. Signe évident du besoin que l’on a de recréer le langage pour créer une nouvelle réalité, de notre apétence pour l’espoir et de notre envie d’être acteurice de ce nouveau monde sans être seul.e. C’est plutôt chouette.
Pour la récap, la Protopie4 c’est le sujet du dernier Cordialement Best Regards, si vous ne l’avez pas vu, je vous invite à le voir car je ne vais pas faire de résumé ici. Pour la référence, la première fois que j’ai entendu Kevin Kelly mentionner Protopia c’était sur ce podcast : The Technological Forces that Are Shaping Our Future. Vous pouvez voir la vidéo de Period que je mentionne sur le CBR ici.
Pour revenir à la Protopie, au fameux travail que chacun.e d’entre nous peut faire pour créer du changement positif à hauteur de 1% afin que, additioné avec le travail de nos voisin.e.s, cela se transforme en révolution radicale de civilisation. Vous avez été tellement à me dire que c’était ce que vous faisiez que ça m’a réchauffé le coeur. Car au vu de la planète qu’on a détruite et du monde qu’on a créé à la place, le doute sur la valeur de l’être humain n’est jamais loin chez moi. On n’est pas ouf quand même comme animal. Moi j’aurais voulu être une baleine.
La question que je me pose c’est : comment donner plus d’ampleur au 1%5 ? Ma réponse actuelle c’est : en faisant circuler les idées. C’est toujours pareil mais il faut toujours le répéter. Kevin Kelly créé un mot qu’il partage, je l’entends, 2 ans plus tard j’en parle en y ajoutant ma sauce, Pauline Harmange6 m’entend, elle en parle à son tour en y ajoutant son épice, et qui sait qui a lu la newsletter de Pauline et va en parler à son tour à son groupe etc. Donner du volume à ce qui nous parle c’est la base et pourtant, le plus souvent, on collecte et on arrête la chaîne de la circulation, ou on se réapproprie sans créditer, or créditer c’est la seule façon de notifier les autres qu’on fait partie d’un tout, qu’on ne déboule jamais de nul part avec une idée ou une émotion, que l’on est que parce que l’on est en rapport aux autres.
Bref, je reviendrai sur tout ça tel un disque rayé car c’est un sujet qui m’anime et aux point d’entrés multiples ; et que ce sont aussi les prémices du dialogue sur le Scenius7.
Avant de conclure, un petit bouquet de lien et d’infos en vrac :
1 - Il y a un mois je suis allée à Paris pour la Dyke March ou Marche Lesbienne. Nous étions plusieurs milliers (plus de 4 000, moins de 10 000 paraît-il). La couverture médiatiques était proche de zéro. Deux heures après il y avait 200 personnes qui faisaient une teuf sauvage aux Buttes de Chaumont avec une Bose et ça, par contre, les médias en ont parlé. Faites attention à ce dont les gens parlent et ce qu’iels passent sous silence. L’histoire s’écrit entre ces lignes. L’ellestoire ? C’est nous qui décidons. Moi j’ai baladé ce message dans les rues parisiennes et j’ai senti mon coeur battre.
2 - Au même moment l’artiste Techno Queer Soul of Bear a sorti une nouvelle track bien nommée Nous Sommes qui est un chant de rage et de vie Queers. Je vous invite à l’écouter avec des enceintes ou les écouteurs bien vissés.
3 - Je suis de plus en plus de comptes de personnes qui sont en transition de genre ou qui se positionnent comme non binaire spécifiquement pour les visions du monde qu’iels partagent. Ce sont souvent des artistes et/ou des humain.e.s avec des plumes affiné.e.s qui font s’entrechoquer des idées, des émotions et des réalités auxquelles je n’ai pas accès et qui me bousculent. Et c’est ce que je recherche je crois. Je me fais souvent la rélexion que dans un monde parallèle qui serait logique, les personnes transgenre seraient dans des positions de leadership, écouté.e.s et respécté.e.s par les cis. Ça me paraît quand même logique qu’une personne qui a vécu l’expérience d’être femme et homme socialement et émotionnellement ait accès à un éventail de situations et d’émotions bien plus large que moi, femme cis. Mais dans ce monde ci, on préfère faire de la résistance au changement. Ouroboros. Tout ça pour dire que si vous aimez confronter vos idées et vos acquis afin de faire évoluer notre espèce, lisez ce texte et ce texte d’Halenni aka @hali_bottom.
4 - Pour celles et ceux qui se demandent quoi faire de leurs idées, notes, citations, et autres germes de pensées, je précise que l’atelier Carnet d’Idées est toujours disponible en replay.
5 - Merci d’être arrivé.e jusque là dis donc. On se retrouve le mois prochain ?
Bisous.
Nathalie
Peut-on être hérétique et s’appuyer sur la tradition ? On va dire que oui. Cette note de bas de page qui ne correspond à rien revient pour la deuxième fois pour vous rappeler que mes fotes sont à la substance de mon discours ce que les rides sont à la substance de mon corps. Elles font parties de moi. Et je pourrais passer ma vie à tenter de lisser qui je suis pour vous plaire mais j’ai décidé d’apprendre à aimer co-vivre avec mon humanité imparfaite. Si vous saignez trop des yeux vous pouvez toujours vous désabonner, c’est gratuit.
Dans l’encyclopédie de ma dictature, le mot historique devient ellestorique. Si vous vous demandez comment j’en suis arrivée là, je vous raconte : en anglais, Histoire se dit History. Si vous le prononcez à haute voix, cela donne HIS-STORY soit SON HISTOIRE. Ce qui est très vrai, si vous ouvrez un livre d’histoire, a priori, vous allez lire l’histoire des hommes. Les anglophones, jamais en reste, ont donc commencé a utiliser HER-STORY pour parler d’une nouvelle histoire qui inclurait l’histoire des femmes. Sauf que, quite à dire un mot qui ne nous ait pas encore familier, je me dis qu’en Français on ferait bien d’utiliser ELLE-stoire. Je vais vous raconter notre ellestoire. Ça fait bizarre en bouche, comme autrice, ou écrivaine il y a encore peu ou probablement trombinoscope et brochette la première fois que quelqu’un.e a proposé de nommer un trombinoscope et une brochette. Changer le monde c’est aussi changer les mots qu’on utilise pour le créer à l’oral comme à l’écrit. Je vous propose d’utiliser ellestoire pour ouvrir une porte vers un nouveau champ des possibilités. Vous me direz si ça marche.
Est-ce que votre percéption du temps est elle aussi devenue tellement élastique que ça en est étourdissant ? Mon temps s’est épaissi et traverser chaque journée a gagné en intensité. Ça me déroute et ça me plaît. Alors au lieu de vous dire “Ces derniers temps” je vais parler de capsule.
Si vous voulez en lire plus à travers mon filtre subjectif sur mon blog en anglais, c’est là. J’ai découvert Kevin Kelly à travers cette interview podcast que je vous recommande.
Pour les supers-pragmatiques qui se demandent “Heu, ok, mais comment tu sais que ce que tu fais est égal à 1% ?” ma réponse en deux capsules : 1) oui, on ne peut pas quantifier votre 1%. Je suis clairement en train de vous vendre une ellestoire qui vous propose un rôle (créer 1% de changement positif par jour dans votre vie) un but (révolutionner la civilisation actuelle) une fin (elle est heureuse), mais qui reste suffisemment flou pour que vous puissiez décider comment exprimer votre 1% suivant vos envies, vos possibilités et votre jugement. 2) dans le doute, faites en plus que pas assez, ça ne mange pas de pain. Personne ne va vous taper le bout des doigts si vous faites plus que 1% de changement les pragmaticos.
Je cite Pauline car elle a le bon goût d’avoir une newsletter donc un archivage facile et direct à porté de clique. Beaucoup de personnes ont rebondi sur la protopie via Instagram mais c’est éphémère et donc compliqué à partager trois semaines plus tard. Mais aussi parce que sa newsletter est formidable de manière générale et que Pauline pousse la conversation un peu plus loin sur la Protopie et le storytelling en particulier et que je vous invite vraiment à découvrir son point de vue.
J’ai fais un sondage il y a quelques capsules pour savoir si les personnes qui me suivent sur instagram voulaient en savoir plus sur le concept de scenius. 99% des votant.e.s ont répondu oui, et sur les 2 personnes qui ont dit “non”, une d’elle m’a écrit pour dire “je voulais voter oui.” Donc on va parler scenius next time.